Dimanche, la Turquie a condamné la décision rendue par une haute cour de l’Union européenne selon laquelle le port du voile peut être interdit, sous certaines conditions. Selon Ankara, cette décision constitue une « violation flagrante des libertés religieuses » et exacerbe les préjugés à l’encontre des musulmanes en Europe.
En effet, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), dont le siège est à Luxembourg, a statué jeudi que les entreprises de l’Union européenne étaient autorisées à interdire à leurs employées, sous certaines conditions, de porter le voile, si cela s’avérait nécessaire pour projeter une image de neutralité à l’égard de la clientèle.
Dans un communiqué, le ministère turc des Affaires étrangères a déclaré que cette décision témoignait de la montée de l’islamophobie au moment où, d’après lui, les femmes musulmanes en Europe subissent une discrimination de plus en plus marquée en raison de leurs croyances religieuses.
« Au moment où l’islamophobie, le racisme et la haine tiennent l’Europe en haleine, la décision de la CJUE fait fi de la liberté de religion et renforce la discrimination en lui offrant une base solide mais aussi une couverture juridique », a souligné le ministère.
Le directeur de la communication auprès de la présidence turque, Fahrettin Altun, a condamné ce samedi la décision en déclarant que « cette mauvaise décision cherche à conférer une légitimité au racisme ».
Cela fait des années que le port du hijab, le voile traditionnel qui couvre la tête et les épaules, divise l’Europe et souligne les profondes divergences de vues sur l’intégration des musulmans.
Le AK, parti islamiste du président turc Recep Tayyip Erdogan, qui a accédé au pouvoir en 2002 en adoptant une approche pro-occidentale et démocratique, a été dénoncé ces dernières années par les pays occidentaux alliés à la Turquie pour l’autoritarisme accru et l’intolérance religieuse dont il fait preuve. Les États-Unis, la Grèce, la Russie et les dirigeants de l’Église se sont dits inquiets au sujet de la décision prise l’année dernière par le gouvernement turc de reconvertir la basilique Sainte-Sophie d’Istanbul en mosquée.
De son côté, Ankara a accusé à maintes reprises les pays européens de ne pas déployer suffisamment d’efforts pour contrer la discrimination à l’égard des musulmans, et a fait part de sa volonté de publier un rapport annuel sur ce qu’elle qualifie de pratiques islamophobes observées à travers le monde.
En réponse à la question de savoir si l’interdiction du port du voile sur le lieu de travail constituait une violation de la liberté de religion, la CJUE a affirmé que cette mesure peut être justifiée par la nécessité pour l’employeur de projeter une image de neutralité à l’égard de la clientèle.
En outre, les relations entre Ankara et l’Union européenne connaissent de fortes tensions sur toute une série de dossiers, en particulier le différend qui oppose la Grèce, pays membre de l’Union européenne, et la Turquie, sur la juridiction maritime et les droits énergétiques en Méditerranée orientale.