L’Unesco fête ses 75 ans d’action pour la culture

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Unesco – Créée en 1946 sur les ruines de la Seconde guerre mondiale, l’Unesco aspire à construire la paix via la culture, la science et l’éducation. Si ce vœu pieux n’a pas résisté à l’épreuve du réel, l’organisation, qui fête ses 75 ans vendredi, affiche de nombreux succès.

Sa devise, ambitieuse, est gravée en dix langues sur un mur de pierre érigé dans son siège parisien : “Les guerres prenant naissance dans l’esprit des hommes, c’est dans l’esprit des hommes que doivent être élevées les défenses de la paix”.

Vendredi à 16H00 (15H00 GMT), quelque 28 chefs d’Etat ou de gouvernement assisteront à Paris à une cérémonie marquant le 75e anniversaire de l’institution.

Ils arpenteront des lieux visités par les plus grands intellectuels : côté francophone, l’anthropologue Claude Lévi-Strauss y prononça dès 1952 un plaidoyer contre le racisme. L’écrivain malien Amadou Hampâté Bâ y réclama la protection des traditions orales africaines en 1960.

Cette même année, un autre écrivain, André Malraux, alors ministre français, se fendit d’un discours immense à l’Unesco : “Il n’est qu’un acte sur lequel ne prévalent ni l’indifférence des constellations ni le murmure éternel des fleuves, c’est l’acte par lequel l’homme arrache quelque chose à la mort”.

L’heure était alors à la sauvegarde des temples d’Abou Simbel, construits treize siècles avant JC et que la construction du barrage d’Assouan en Egypte menaçait d’ensevelir. Sous la direction de l’Unesco, ces immenses lieux de culte furent découpés pierre par pierre et déplacés.

«Une tribune»
Un chantier monumental à la base de la Convention du patrimoine mondial, la plus connue de l’Unesco, signée en 1972, qui protège aujourd’hui plus de mille sites culturels et naturels, classés dans 167 pays.

“Après 75 ans d’existence, le bilan de l’Unesco est remarquable”, particulièrement sur le patrimoine, remarque Chloé Maurel, chercheuse associée à l’université de la Sorbonne, spécialiste de cette institution et de l’ONU.

D’autant que l’Unesco a été toutes ces années “une tribune où se sont exprimés de nombreux orateurs et oratrices, une enceinte pour les pays du Sud pour leur permettre de s’affirmer”, poursuit cette historienne, dans une réponse écrite à l’AFP.

L’Unesco n’a toutefois “pas soutenu les mouvements de lutte pour la décolonisation” dans les années 1940-50, car “parmi ses membres fondateurs les plus importants figuraient d’importantes puissances coloniales”, France, Royaume-Uni et Belgique, “qu’elle ne voulait pas risquer de heurter”, pointait-elle toutefois dans une recherche publiée en 2009.

Aujourd’hui encore, “la nécessité de respecter +le politiquement correct+ et de ne vexer aucun Etat-membre limite (sa) liberté de parole”, observe Mme Maurel.

L’Unesco, tout au long de son histoire, a ainsi tenté de définir des normes, au travers de conventions longuement discutées, telles celles sur le droit d’auteur (1952), le trafic illicite de biens culturels (1972), ou le patrimoine culturel immatériel (2003), dont la signature a pris… soixante ans.

Mais elle reste souvent critiquée pour son manque de dynamisme et la faiblesse de ses réalisations concrètes.

«Très peu de fonds»
“A l’origine, l’Unesco n’a pas été pensée pour être opérationnelle. C’est une organisation extrêmement juridique qui a un rôle essentiellement normatif”, souligne Mathilde Leloup, maîtresse de conférence à l’université Paris 8, autrice d’une thèse portant notamment sur l’action de l’Unesco au Mali.

L’institution fonctionne en outre “avec très peu de fonds”, qui lui “rendent difficile de mener des actions d’envergure sur le terrain”, remarque-t-elle. Son budget n’est que d’environ 700 millions d’euros par an.

En 2015, l’Unesco a toutefois permis la restauration des mausolées de Tombouctou par des artisans maliens. Elle est impliquée dans la reconstruction de Mossoul, détruite par trois années de bataille urbaine contre l’Etat islamique, et Beyrouth, après l’explosion du port ayant ravagé son centre en 2020.

Tous les pays du monde, à l’exception des Etats-Unis, d’Israël et du Liechtenstein en font partie. Washington et Tel Aviv avaient quitté l’Unesco avec fracas en 2017, après que l’organisation basée à Paris eut reconnu la Palestine comme Etat-membre.

Un dialogue est en cours avec les Etats-Unis pour qu’ils rejoignent à nouveau l’Unesco, affirme sa directrice général Audrey Azoulay, dont le mandat de quatre ans a été reconduit mardi.

“L’Unesco est une jeune fille pleine de projets : 75 ans, c’est la prime jeunesse. La fraîcheur et l’innovation sont intactes”, se félicite Matthieu Guével, son directeur de la communication.

Et d’ajouter : “L’Unesco protège les pyramides d’Egypte, la muraille de Chine, le Machu Picchu, des principes universels. Soixante-quinze ans, ce n’est que le début de l’aventure.”

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